Peterborough, ON, Canada
Gregory B. Mitchell
Résidence actuelle : Kingston, ON, Canada
Je crois fermement à la valeur intrinsèque du maintien de la paix après avoir consacré de nombreuses années à son étude et à sa pratique. Lorsque le travail est bien fait, il peut garantir la paix et offrir de l’espoir aux populations des régions du monde déchirées par la guerre qui, autrement, continueraient à souffrir de la violence et des conséquences horribles que la guerre engendre inévitablement - maladies, famine et déplacements. Certains de mes souvenirs les plus marquants du maintien de la paix sont liés à des conversations et à des rencontres individuelles avec des civils locaux, d’anciens combattants et d’autres soldats de la paix. Au cours de la première de mes trois affectations au Forces des Nations Unies à Chypre (FNUC), trois ans seulement après l’invasion turque qui avait coûté la vie à deux soldats canadiens, j’ai rencontré une vieille dame chypriote grecque. Obligée de recommencer sa vie à Nicosie, elle avait été déplacée à jamais de sa maison de Kyrenia, où seuls les Chypriotes turcs étaient désormais admis. Plus tard lorsque nous accompagnions une patrouille canadienne déployée à la Mission des Nations Unies en Ethiopie et en Érythrée, (MINUEE), nous avons contourné l’un des nombreux champs de mines non déminés et mortels entre les armées de l’Éthiopie et de l’Érythrée, où les restes squelettiques de jeunes soldats n’avaient pas été identifiés ni réclamés. Je ne pouvais qu’imaginer la douleur et la souffrance des familles qui se demanderaient à jamais ce qui était arrivé à leurs fils bien-aimés. Aussi, alors que nous étions en poste avec la Mission des Nations Unis au Soudan, (MINUS), nous avons négocié avec d’anciens combattants de la guerre civile qui venait de prendre fin, et j’ai été choqué et attristé par les déclarations de leurs commandants supérieurs. Interrogés, ils déclaraient calmement qu’après 20 ans de combats, ils n’avaient pas de prisonniers à libérer, admettant sans gêne que l’exécution de prisonniers était un crime de guerre. Les deux parties ont également refusé de reconnaître qu’elles utilisaient des enfants comme soldats, ce que nous, membres de la mission de maintien de la paix, savions être faux.
Pendant mon séjour en Haïti, j’ai eu la chance de voir de mes propres yeux le bon travail accompli par la MINUSTAH pour aider l’une des nations les plus pauvres du monde. Malheureusement, plusieurs de mes collègues de l’ONU ont été tués plus tard lors d’un tremblement de terre dévastateur qui a également coûté la vie à des centaines de milliers d’Haïtiens. Deux agents de la GRC et six civils canadiens travaillant avec l’ONU figuraient parmi les morts. En Bosnie, avec des soldats canadiens de la Force de Protection des Nations Unies, (FORPRONU) où, nous avons rendu visite à un couple d’octogénaires qui avait récemment choisi de retourner dans leur petit village, plutôt que de rester en sécurité avec leur famille élargie à Oakville (ON), où il avait fui la guerre des années auparavant. Leur maison avait été détruite et simplement une bâche donnée par le Canada en guise de toit servait de pied à terre, sans électricité ni d’eau courante, avec un maigre jardin pour se nourrir, où certainement aucun service de santé, d’assainissement ou médical était disponible. Pourtant, ils semblaient satisfaits, car c’était leur chez nous, où ils avaient choisi de retourner pour vivre le reste de leurs jours, malgré les ravages de la guerre si évidents autour d’eux. J’étais inquiet de leur vulnérabilité et de l’improbabilité de leur survie, mais j’étais également impressionné par leur foi, leur résilience et leur détermination, et j’ai été honoré qu’ils me confient une lettre que j’ai ensuite remise en personne à leur famille élargie au Canada.
Au fil des ans, trouvant un terrain d’entente et un respect mutuel entre nous, j’ai développé de nombreuses amitiés avec des humanitaires, des policiers et des diplomates internationaux dévoués, ainsi qu’avec d’autres soldats de la paix du monde entier. Je me suis également lié à l’occasion avec des soldats qui étaient d’anciens combattants que nous étions là pour séparer et avec lesquels nous avons entretenu et fait respecter des accords de cessez-le-feu. Cependant, les meilleurs souvenirs que j’ai sont ceux des Canadiens et Canadiennes, militaires, policiers et civils, avec qui j’ai été déployé dans des pays lointains. Au service de la paix, nous avons travaillé ensemble, nous nous sommes sacrifiés ensemble, nous avons rompu le pain ensemble et nous avons partagé les liens de camaraderie qui découlent du fait de surmonter des difficultés, de vivre dans des environnements austères et dangereux et d’apporter un semblant de paix dans un coin du monde auparavant déchiré par la guerre. À notre manière, disons une manière positive, nous avons volontairement donné de nous-mêmes, de façon désintéressée et souvent au prix d’énormes sacrifices personnels, au profit d’autres personnes moins fortunées. Au Canada, nous avons la chance de ne pas connaître la guerre dans notre propre pays ; pourtant, dans ce monde, nous, les Canadiens. malheureusement, sommes en minorité. C’est pourquoi le maintien de la paix est si important et pourquoi j’en suis un fervent partisan.
Biographie
Je suis le fils d’un père honorable et dévoué, qui était un ancien membre de l’ARC pendant la Seconde Guerre mondiale, et d’une mère extraordinaire, ils ont élevé ensemble cinq enfants. J’ai grandi à Peterborough (ON), où j’ai fréquenté l’école primaire Highland Heights et l’école collégiale et professionnelle Adam Scott. J’ai aussi été membre de la troupe locale de scouts, de l’escadron 534 des cadets de l’air et de la réserve de la Force aérienne. Mon épouse et moi habitons présentement à Kingston (ON). Ensemble, nous avons trois fils adultes, dont deux servent dans l’armée.
Diplômé du Collège militaire royal du Canada, j’ai obtenu un baccalauréat ès arts en littérature anglaise et j’ai été commandant de l’escadre des cadets, remportant des prix universitaires et militaires, dont la prestigieuse épée d’honneur. Après un bref passage infructueux comme élève-pilote, je suis devenu officier d’infanterie et j’ai finalement servi trois fois au sein du 2e Bataillon *The Royal Canadian Regiment* (2RCR) du 5e Groupe-brigade mécanisé du Canada (2GBMC) et deux fois au sein du Canadian Airborne Regiment, une unité de la Force de service spécial. En tant que commandant du 2RCR, j’ai commandé un groupement tactique de 1200 personnes pendant la crise d’Oka.
Greg a occupé des postes d’état-major supérieur au Centre d’instruction au combat, au Secteur central de la Force terrestre et au QG de l’Armée de terre. Il a été le fondateur et le premier commandant de l’École de tactique de l’Armée de terre, et le commandant de la base des Forces canadiennes de Petawawa. En tant que commandant du Secteur de l’Atlantique de la Force terrestre, il était responsable de la préparation de la réponse militaire dans les quatre provinces de l’Atlantique pour le fameux bogue de l’an 2000 (Y2K) et a dirigé l’effort de soutien militaire au Canada atlantique le 11 septembre lorsque 24 000 passagers et membres d’équipage, initialement destinés aux États-Unis, ont été détournés pour atterrir dans l’Est du Canada.
En plus d’être diplômé de l’École d’état-major des Forces canadiennes, du Collège d’état-major de l’Armée de terre, du Collège d’état-major et de commandement des Forces canadiennes et du Collège de la Défense nationale du Canada, il a obtenu une maîtrise en administration publique de l’Université Queen’s et une maîtrise en sécurité publique de l’Université Wilfrid Laurier. Il a également étudié le maintien de la paix en Italie, en Suède, au Kenya et aux États-Unis. Greg a participé à trois missions de maintien de la paix des Nations Unies (l’ONU) à Chypre en tant qu’officier du bien-être du contingent, commandant de compagnie et commandant adjoint du contingent. Il a également eu l’occasion de rendre visite aux troupes canadiennes déployées dans le cadre des missions de l’ONU en Éthiopie-Érythrée, au Liban, en Haïti et en Bosnie, ainsi que de la mission de l’Union africaine (UA) au Darfour.
La dernière affectation militaire de Greg a eu lieu au Danemark, où il a été le seul Canadien à commander la Brigade multinationale d’intervention rapide des forces en attente des Nations Unies (BIRFA). Il a servi de conseiller militaire de l’ONU lors des négociations de cessez-le-feu au Soudan, mettant ainsi fin à 20 ans de guerre civile. Il a aidé l’ONU à planifier et à établir ses missions politiques et de maintien de la paix au Soudan, dirigeant le déploiement du QG de la BIRFA et servant les deux missions en tant que, respectivement, premier conseiller militaire et premier commandant adjoint de la force. À l’époque, la mission intégrée Nord-Sud-Soudan de l’ONU était la plus importante, la plus complexe et la plus coûteuse de l’histoire du maintien de la paix de l’ONU, comprenant 10 000 militaires de 25 nations, un budget annuel d’un milliard de dollars américains et couvrant une superficie équivalente à celle de l’Europe de l’Ouest. Pendant son séjour, Greg a également participé à la formation et à la planification de la mission hybride ONU-UA au Darfour.
Après sa retraite, Greg a déménagé avec sa famille de Copenhague, au Danemark, à Scottsdale, en Arizona, et a obtenu sa résidence permanente (carte verte) pour poursuivre son travail d’expert en maintien de la paix militaire, d’abord à New York pour le compte du département des opérations de maintien de la paix des Nations unies, où il a dirigé l’élaboration d’un guide sur la façon de lancer de nouvelles missions de maintien de la paix. Plus tard, il a été directeur de l’initiative sur les enfants soldats de l’honorable Roméo Dallaire, qui se consacre à l’éradication de l’utilisation d’enfants comme soldats. Il a ensuite été employé par le Centre Pearson pour le maintien de la paix à Ottawa en tant que directeur des exercices et des simulations. En partenariat avec le ministère des Affaires étrangères et l’Union européenne (EURORECAMP), il a travaillé principalement en Éthiopie avec la Force de réserve pour le maintien de la paix de l’Union africaine, fournissant des exercices de formation au niveau opérationnel pour les diplomates de haut rang, les militaires, les policiers et les humanitaires.
Pendant huit ans, Greg a donné des cours sur le programme de commandement et d’état-major interarmées du Collège des Forces canadiennes sur des sujets allant de l’éthique et du leadership au maintien de la paix et à la lutte contre le terrorisme. Il a également été directeur exécutif du Club des collèges militaires royaux du Canada, au service des anciens élèves de trois collèges militaires. Actuellement, Greg est directeur exécutif d’une entreprise qu’il a fondée, *Peace Operations Consulting*, ainsi que conseiller spécial sur le maintien de la paix auprès de l’Association canadienne des vétérans pour le maintien de la paix, au nom de laquelle il aide à créer cette anthologie des expériences canadiennes en matière de maintien de la paix.
Greg avec des enfants Erythréens, 2001.
Greg (à l’extrême droite) rencontre le prince Charles (aujourd’hui roi Charles III), à Nicosie, à Chypre, 1986.