Montréal, QC, Canada
Jane Boissonneault
Résidence actuelle : Ottawa, ON, Canada
J’avais à peine 10 ans quand j’ai décidé que je voulais être gendarme. Je savais que ce type de carrière risquait de m’éloigner de Montréal (Québec) où je vivais. Mais pas à quel point !
J’ai entendu beaucoup d’histoires sur ce à quoi il faut s’attendre dans une mission de maintien de la paix. Heureusement un ami avait pris part à plusieurs missions des Nations Unies et il m’a convaincue de franchir le pas et d’aller au Timor oriental. Je me disais qu’à défaut de pouvoir changer le monde, je pourrais peut-être améliorer la vie de quelques personnes. Et que cela en valait la peine.
Je suis donc arrivée en Asie du Sud-Est avec l’intention de faire une différence dans la vie des gens à un niveau personnel. Ce fut extrêmement enrichissant de travailler dans une culture tellement différente de la mienne, aux côtés de policiers des quatre coins du monde ! Mais notre rôle d’instructeurs de police au Timor oriental n’était pas très différent de ce que l’on faisait dans nos pays d’origine. Nous étions là pour encadrer les nouvelles recrues du Service de police du Timor oriental (SPTO) qui apprenaient les bases du maintien de l’ordre.
Durant mon affectation, j’ai sillonné de nombreux villages de montagne. C’est ainsi que j’ai fait la connaissance de Maria, jeune recrue du SPTO. Ce petit bout de femme de moins d’un mètre cinquante avait un cœur immense et une formidable détermination. Maria voulait changer la perception qu’avaient les communautés locales de la police, et des policières en particulier. J’ai été heureuse d’être sa mentore.
J’ai été mutée au Groupe des enquêtes pour mettre sur pied un groupe d’enquête sur les personnes disparues et les personnes vulnérables ; Maria également. Ensemble, nous avons enquêté sur des agressions sexuelles, des violences intrafamiliales, ainsi que sur une tentative de meurtre. Maria était très douée pour auditionner les victimes, en particulier les femmes et les enfants. Elle faisait ça naturellement et ne semblait jamais intimidée face aux suspects. Puis, j’ai été de nouveau mutée, tandis que Maria est demeurée au Groupe des enquêtes. Je l’ai revue une fois au dernier jour de mon affectation au Timor oriental. Elle entamait un cours sur les enquêtes relatives aux personnes vulnérables. Je savais que nous ne nous reverrions plus. Au cours des années qui ont suivi, j’ai souvent pensé à elle. Je savais qu’elle continuait d’œuvrer à changer les choses dans sa communauté.
Cinq années après mon départ du Timor, je me trouvais en Italie où j’étais déléguée du Canada à une conférence des Nations Unies sur la réforme de la police pour une prise en compte des spécificités de genre dans les sociétés qui sortent d’un conflit. Et devinez qui représentait le Timor oriental ? Nulle autre que Maria ! Elle avait beaucoup progressé dans sa carrière et était devenue inspectrice adjointe (grade intermédiaire entre sergent d’état-major et inspecteur). Elle me dépassait désormais en grade ! Elle m’a remerciée et m’a dit que je lui avais montré ce qu’une policière peut faire et être ; que j’avais été un modèle pour elle et que cela l’avait aidée à se hisser au niveau où elle était. J’avais toujours eu l’impression d’avoir fait quelque chose de bien au Timor oriental. Et voilà qu’elle me le confirmait personnellement.
C’est avec cette conviction que j’ai rempilé pour une deuxième mission des Nations Unies en 2011, cette fois en République démocratique du Congo. J’étais chargée de surveiller la construction de postes de police et l’affectation du personnel. Un jour, alors que j’assistais à l’inauguration officielle d’un nouveau poste, j’ai vu l’espoir éclairer les visages des villageois et des policiers et policières qui prêtaient serment de les servir. C’était émouvant. L’une d’elles sera-t-elle la prochaine Maria, qui œuvrera sans relâche de l’intérieur au développement de sa communauté ?
La GRC m’a permis de travailler aux quatre coins de mon pays et à l’étranger. De ces expériences, j’ai appris que tous les êtres humains aspirent aux mêmes choses ; nous voulons que nos familles soient en sécurité et en bonne santé ; nous voulons être en mesure de leur fournir les choses nécessaires ; nous voulons que nos communautés vivent dans la paix et la sécurité ; nous voulons élever nos enfants dans un monde qui a un avenir. Ce sont ces valeurs qui m’ont poussée à devenir policière. Pouvoir encadrer des gens qui poursuivent les mêmes objectifs dans leur communauté a été l’aspect le plus gratifiant de ma participation aux missions des Nations Unies.
Biographie
La sergente d’état-major Jane Boissonneault est membre de la Gendarmerie royale du Canada depuis 30 ans. Après plusieurs années aux services généraux dans différents détachements de la Saskatchewan, elle a été affectée au Groupe des délits commerciaux à Regina, où elle a été promue caporale à sa 10e année de service. Elle a ensuite été affectée aux enquêtes sur les fraudes d’envergure et la corruption à Ottawa et Montréal.
De Montréal, elle a été promue sergente à la Sous-direction de la vérification interne, de l’évaluation et de l’examen, à la Direction générale de la GRC à Ottawa.
Elle a pris part à deux missions de maintien de la paix des Nations Unies. Durant la première, auprès de l’Administration transitoire des Nations unies au Timor oriental, elle était chargée de mettre sur pied le Groupe d’enquête sur les personnes disparues dans le district d’Ermera et de diriger le Groupe national d’enquête sur les personnes vulnérables au QG de la police civile des Nations Unies à Dili. Durant sa seconde affectation, cette fois auprès de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), elle était responsable de la coordination du dossier des violences sexuelles et sexospécifiques, et coordonnatrice de la stabilisation pour la réforme du secteur de la sécurité, en poste à Goma, dans la province du Nord-Kivu située dans l’Est du Congo.
À son retour de RDC en janvier 2012, elle a été nommée sous-officière responsable des Opérations nationales liées aux enfants disparus (ONED), qui font partie du Centre national pour les personnes disparues et les restes non identifiés, à la GRC.
À ce titre, elle était gestionnaire du bureau d’information sur les personnes disparues pour le Canada et présidente du Groupe de travail national sur Alerte Amber. Elle a également été représentante de la GRC pour le Programme nos enfants disparus, une organisation regroupant plusieurs ministères et organismes fédéraux qui collaborent pour retrouver les enfants disparus et les ramener à la maison.
Durant les années que Jane a passées à Ottawa, elle s’est portée maintes fois volontaire pour représenter la GRC aux cérémonies organisées dans la région de la capitale nationale, ainsi qu’à l’étranger. Elle a aussi dirigé pendant plusieurs années la Troupe d’honneur aux célébrations de la fête du Canada sur la colline du Parlement. Elle a d’ailleurs reçu un certificat de reconnaissance soulignant son engagement et son dévouement à représenter la GRC aux cérémonies.
En février 2017, Jane a été promue sergente d’état-major et nommée analyste-réviseure supérieure aux Enquêtes criminelles au QG de la Division M à Whitehorse (Yukon). En plus de ses fonctions attitrées, elle a été aide de camp du commissaire du Yukon, ce qui lui a valu la Citation du commissaire et la Reconnaissance vice-royale.
En février 2020, Jane a été mutée à la Direction générale de la GRC à Ottawa au poste de sous-officière-conseillère aux Missions de paix internationale, qui gèrent l’affectation de policiers canadiens et d’experts civils aux missions de paix dans le monde.
La s.é.-m. Jane Boissonneault (g.) et une consœur tchadienne de la police des Nations Unies sourient au défilé de la Journée internationale des femmes à Goma (RDC), en 2011.
La s.é.-m. Jane Boissonneault reçoit sa médaille des Nations Unies durant son affectation en RDC.